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DRM contre Web ouvert : le drame shakespearien du W3C.

Le W3C (World Wide Web Consortium) veut permettre aux diffuseurs de contrôler la lecture de leurs contenus protégés. Il répond ainsi aux demandes du marché, mais sacrifie au principe de neutralité du Web. Cela crée un malaise au sein du consortium, qui a ouvert un débat public pour, peut-être, se libérer du poids de cette décision.

Le choix des DRM dans HTML5.

Le W3C a publié un court billet intitulé DRM and the Open Web (en anglais). Il a souhaité ainsi répondre aux critiques formulées contre sa décision d’étendre les possibilités de HTMLMediaElement pour permettre de contrôler la lecture de contenus protégés. En d’autres termes : de mettre des DRM, surnommés menottes numériques (Wikipédia), dans HTML5.

Très tôt dans le texte, le W3C affirme ne s’être soumis ni à la politique des DRM ni à l’élaboration d’un tel système (W3C is not developing a new DRM system, nor are we embracing DRM as an organization.). Néanmoins, le consortium est conscient de l’intérêt des diffuseurs de contenus pour le Web (et pour la technologie HTML5), et dès lors reconnaît que leurs exigences influeront logiquement sur les nouveaux usages.

À noter : cette remarque malicieuse mais maladroite, précisant que contenus ouverts ne signifient pas contenus gratuits (we do not equate “open” content with material that must be available free of charge.)

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L’ouverture d’un groupe de travail public.

Pour structurer le débat, le W3C propose alors à tous les gens intéressés de participer à leur groupe de travail sur les limitations médias (en anglais) (Restricted Media Community Group). Il s’agira à terme de développer des techniques de verrouillage, tout en cherchant comment garder le Web ouvert au maximum (how to keep the Web maximally open) ; en d’autres termes, de concilier les réalités économiques et techniques avec la santé à long terme du Web (we seek a solution that considers both today’s business and technical realities and the long-term health of the Web). D’une certaine manière, le W3C admet ici que les DRM sont bien une menace contre le Web ouvert — voire le Web tout court.

Ainsi, la mise en place du groupe de travail sur les limitations médias me donne l’impression mélangée que le W3C :

  1. Est conscient du succès et des défis du Web, et qu’il fait participer à juste titre tous ses acteurs ;
  2. Est conscient d’abandonner quelques-uns de ses principes fondateurs, et qu’il lance un grand débat pour se racheter.

Mais ce qui me peine en définitive, c’est que le W3C ne dise pas que la réponse aux demandes de l’industrie ne passe peut-être simplement pas par les menottes numériques…

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Nota : Vous pouvez aussi lire les réactions à cet article sur linuxfr.org.

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